Le 26 juin 2025, un projet de « loi de modernisation et de régulation de l’enseignement supérieur » a fait son apparition sur les messageries des membres du Conseil supérieur de l’éducation, en vue de son examen le 3 juillet par l’instance. Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (ESR) assume de vouloir verser au plus vite ce projet de loi au débat parlementaire, au mépris de toute concertation sociale, arguant de son caractère à priori consensuel, puisqu’il s’agirait seulement, selon lui, de réguler l’enseignement privé dont les dérives sont bien connues. C’est tout l’inverse en pratique !
La lecture du projet de texte montre que cette ambition est loin d’être évidente et qu’il marque un pas de plus vers la mise en concurrence généralisée entre établissements publics et privés. Si ce projet de loi venait à être adopté, il offrirait des ponts d’or aux établissements privés quand le service public est affaibli d’année en année par l’austérité budgétaire.
Au nom de la « soi-disant » simplification, un cran de plus serait franchi dans l’autonomie — c’est-à-dire la dérégulation — des établissements d’enseignement supérieur public : prolongation de 5 ans de l’expérimentation des regroupements d’établissements par les établissements publics expérimentaux (EPE), intégration dans le droit commun — le code de l’éducation — des grands établissements issus des EPE dont les statuts organisent l’affaiblissement de la démocratie universitaire.
Au nom de la régulation de l’enseignement supérieur privé, au côté de quelques mesures de protection des usagers contre les arnaques, c’est au contraire une accélération dérégulatrice qui est prévue. La reconnaissance de ces établissements et de leurs formations — à la demande de leurs dirigeants — est bien l’objet central du projet de loi, ainsi que, cerise sur le gâteau, la possibilité de délivrer des grades et titres universitaires, qui est aujourd’hui le monopole de l’État, au titre de son rôle de certificateur avec tout ce que ceci structure dans la classification des métiers dans l’ordre public social.
Au nom de l’innovation, c’est un acte de plus de déconcentration par le transfert de responsabilité du ministère de l’ESR vers les recteurs de région académique (nomination de directeurs d’écoles, intervention dans les ouvertures de formations), ce qui s’ajoute à la réforme — sans concertation — du financement des établissements publics actuellement en cours. À bas bruit, celle-ci généralise la mise en place de contrats d’objectifs de moyens et de performance (COMP), à 100 % sous la responsabilité du recteur, ce qui constitue une véritable mise sous tutelle politique des établissements du supérieur. On voudrait se donner les moyens managériaux de soumettre les établissements publics à l’austérité permanente qu’on ne s’y prendrait pas autrement.
Les mots sont importants : l’objet de ce projet de loi n’est à l’évidence pas la régulation de l’enseignement supérieur mais bien sa dérégulation par une attaque en règle contre le service public.
Quant à la méthode et au calendrier : l’été est propice aux coups de force de gouvernements affaiblis, nous en avons déjà fait l’expérience tant le débat public sur l’ESR n’est jamais une priorité.
Pour le SNASUB-FSU, ce projet de « loi de modernisation et de régulation de l’enseignement supérieur » doit être immédiatement retiré compte tenu des dangers graves qu’il contient pour l’avenir, pour un service public de l’enseignement supérieur démocratique, accessible à toutes et tous. Pour le SNASUB-FSU, dès la rentrée, la mobilisation des personnels pour faire échec à cette politique sera déterminante pour défendre le service public d’enseignement supérieur.