Un guide méthodologique
Fin mars 2008, le ministère de la Fonction publique (DGAFP) a diffusé dans les ministères un guide méthodologique de la GPRH dans les services de l’État.
Bien que rédigé avant l’examen par le Parlement du projet de loi «mobilité», avant la signature du protocole sur le «dialogue social» et avant la conclusion des travaux sur la RGPP (Révision générale des politiques publiques), ce document s’inscrit résolument dans leur logique et est guidé de bout en bout par la volonté obsessionnelle de supprimer le plus grand nombre possible d’emplois.
Dès le début de ce guide, tout le discours idéologique libéral est convoqué. Les affirmations les plus contestables sont assénées comme des évidences qu’il n’est même plus question d’interroger. Pour preuve, ces quelques morceaux choisis :
«Les chefs de service sont responsabilisés et doivent agir selon le principe de performance.»
«La situation dégradée des finances publiques fait de la diminution de la dette publique un objectif prioritaire pour l’État. Les dépenses de personnel représentant une part importante du volume global, il est nécessaire de maîtriser puis de réduire la croissance des coûts, notamment ceux qui sont liés à la masse salariale.»
«La RGPP a pour objectif de fixer la feuille de route des changements à conduire pour rationaliser la dépense publique en adaptant les politiques publiques aux exigences actuelles de la société» (lesquelles ? cela ne nous sera pas révélé).
«…cela passe par une gestion plus personnalisée, plus économe en ressources et résolument tournée vers les besoins des services.»
Il y est expliqué que la «déconcentration managériale» doit permettre aux chefs de service d’agir directement ou indirectement sur la structure et le coût des emplois du service, sur la valorisation des compétences des agents, sur la modulation de leurs régimes indemnitaires et leur carrière, entre autres.
Des outils méthodologiques sont proposés aux DRH pour calculer un «ratio d’efficience», dont l’unique objectif est d’identifier les emplois qui devront être supprimés.
C’est ainsi qu’on y trouve, sous l’intitulé «Bonne pratique» (ça ne s’invente pas !) un tableau de «modélisation sur 4 ans des effectifs d’un ministère». Il fournit la méthode pour passer d’un effectif de 40 000 agents au 1er janvier 2008 à 35 700 au 31 décembre 2011, soit la suppression de 10,8% des emplois.
La GPRH s’inscrit dans la démarche métier déclinée aux niveaux local (poste de travail – fiche de poste), ministériel (emplois type) et interministériel (emplois référence).
S’agissant de ce dernier point, le document anticipe le vote de la loi «mobilité» dans une perspective de redéploiement interministériel. La RGPP devant aboutir à la suppression d’un très grand nombre d’emplois, le guide méthodologique se préoccupe du sort des fonctionnaires dont le poste sera supprimé. On y lit ceci :
«Nombreux sont les agents préférant une mobilité structurelle – entre services – dans leur bassin de vie. Aussi, l’acceptabilité sociale des réorganisations incite-t-elle à mobiliser toutes les possibilités de réaffectation des agents au sein de services appartenant au même bassin d’emplois. La démarche GPRH interministérielle locale a donc pour objectif … de favoriser les mobilités interministérielles locales».
Aucune tarte à la crème n’étant écartée, ce guide s’offre un développement sur le dialogue social. Il est rappelé aux DRH qu’il faut «expliquer, concerter et négocier pour enrichir la prise de décision et s’assurer que les mesures envisagées sont bien comprises».
Néanmoins, il est recommandé de ne pas pousser trop loin la négociation. On lit en effet : «Les choix intermédiaires dans le processus de GPRH doivent être opérés en toute transparence». Il s’agit en fait d’informer, d’expliquer et non de négocier. Pour ceux qui n’auraient pas compris, la dernière phrase remet les points sur les i : «La GPRH reste un outil d’aide à la décision et ne peut constituer un objet de négociation au risque de perdre sa pertinence opérationnelle».
Ce guide méthodologique constitue un élément supplémentaire dans l’arsenal dont le gouvernement veut se doter pour mener à bien son plan social dans la fonction publique.
Philippe Rampon