Le SNASUB-FSU avait pointé le risque d’attribuer la mission restauration scolaire aux collectivités locales et avait fait remarquer que non seulement la restauration n’avait rien à voir avec la maintenance et l’entretien, prolongement de la compétence construction, gros entretien et dotations de fonctionnement mais encore que le risque de « faire du fric » sur le dos des établissements et des familles en donnant au privé la confection des repas était bien réel.
A ce titre, c’est l’EPLE et non l’Etat qui perdait une compétence et que donc l’autonomie des établissements était mise à mal face à des collectivités donc certaines salivaient à l’idée de mettre la main sur la restauration scolaire.

Dans une région méridionale, la droite au pouvoir imagine une belle usine à gaz : voilà un collège qui en plus de ses élèves, confectionne des repas pour l’école primaire depuis des lustres. Se monte une maison de retraite à proximité… Pourquoi le collège n’assurerait-il pas également la restauration de cette institution ? Effectivement cela se fait ailleurs. Jusqu’ici tout va bien.
Cela se gâte lorsque pour exercer cette mission, la région imagine un GIP, “machin” mi-public mi-privé qui dans l’enceinte du collège et avec les personnels territoriaux, « ses personnels », confectionnerait les repas du collège, du primaire et de la maison de retraite.
Quelles en sont les incidences ? Le collège devient adhérent du GIP et reçoit une facture pour les repas servis aux demi-pensionnaires et commensaux. Le collège ne fait plus les achats de denrées, n’a plus de magasin, plus de stock à tenir, plus de crédit nourriture à suivre…
Dans un collège de petite taille où ce type de tâches constitue l’essentiel du travail du service intendance, on peut s’inquiéter. En effet à quoi cela sert-il que le collège reste un EPLE s’il perd la mission restauration scolaire au profit d’un prestataire extérieur ?

Le scénario est déjà écrit. La charte de pilotage signée par la plupart des syndicats de chefs d’établissement a déjà prévu de transformer les petits établissement en Unités Pédagogiques de Proximité (UPP), nouveau “machin” dépourvu de personnalité morale dans lequel un personnel (un enseignant, un CPE, un administratif, etc…) serait le correspondant ; cet UPP serait rattaché à un EPLE de plein exercice.
Dans notre exemple, le « gestionnaire » qui n’aurait plus rien à faire en matière de restauration scolaire pourrait bien être ce « correspondant », ce chef d’établissement au rabais. Quant aux personnels TOS exerçant en cuisine, ils deviennent personnels du GIP lequel trouvera bien un argument financier pour les attirer dans son antre.

Devant ce projet, des questions. Les tarifs et les droits constatés ? Comment allier le prix que demandera le GIP avec ce que payent les familles et surtout avec les bourses? Est-ce que les élèves vont gagner au change ? En terme de qualité, passer d’une cantine aux repas élaborés tous les jours à une sorte de cuisine centrale, on peut en douter. En terme de prix à payer, malgré l’idée simpliste qui consiste à penser que plus on fait de repas moins le prix payé est faible, c’est bien le contraire qui se produit. Chacun connaît le tarif d’un repas servi par une cuisine centrale d’une commune pour ses écoles maternelles et primaires (la majorité des communes fonctionnent en effet en cuisines centrales).
Enfin, pour les personnels, comment justifier le maintien de personnels administratifs dans ce cadre ? Certains ont même expérimenté à Levallois Perret d’externaliser les droits constatés à une entreprise privée. Résultat, l’établissement ne calcule plus le prix à payer par les familles, ne s’occupe plus des dossiers de bourse, de l’encaissement des frais scolaires.

Face à nos arguments, la collectivité locale en question s’est défendue au nom de l’intérêt général et de la nécessité d’assurer un développement économique pour le secteur concerné ! Voilà le collège conduit à être un acteur du développement économique… On s’éloigne de l’objet de l’Ecole qui est, si on se souvient bien, d’assurer l’éducation, l’instruction et la formation des enfants.

Résumons-nous : la restauration scolaire confiée à un GIP ici, les droits constatés à une entreprise privée là, tous les ingrédients sont réunis pour une mauvaise recette, celle de la disparition des administratifs des EPLE ou de ce qu’il en restera !

Thomas Vecchiutti