Maladies imputables au service

Les agents atteints d’une maladie imputable au service aussi appelée « maladie professionnelle », disposent d’un régime spécifique semblable à celui applicable aux accidents de service.

Les maladies professionnelles résultent :

  • de l’exposition prolongée à un risque professionnel ;
  • ou d’une intoxication sous l’effet répété de certaines substances ou émanations De nombreuses maladies professionnelles ne se manifestent pas immédiatement après l’exposition au risque qui les provoque. La« période de latence » s’étend parfois jusqu’à plusieurs décennies. Il est donc possible de déclarer une maladie professionnelle au départ en retraite.

Les tableaux des maladies professionnelles annexés au code de la sécurité sociale recensent les affections reconnues comme telles. Mais, sous certaines conditions, des maladies n’y figurant pas peuvent également être prises en charge.

  • Maladies qui remplissent les conditions des tableaux : présomption d’imputabilité

C’est à l’agent qui fait la demande de reconnaissance de maladie professionnelle d’apporter les éléments permettant d’établir que la maladie répond aux conditions prévues par les tableaux. Lorsque la maladie répond aux conditions médicales, professionnelles et administratives mentionnées dans les tableaux, elle est « présumée » d’origine professionnelle, sans qu’il soit nécessaire d’en établir la preuve, même si on retrouve dans le passé de l’agent d’autres causes, par exemple une intoxication tabagique, qui peuvent très bien être aussi à l’origine de sa maladie.

  • Maladies qui ne remplissent pas les conditions des tableaux : L’agent doit alors établir qu’elle est directement causée par son activité professionnelle.
  • Maladies hors tableaux L’agent doit établir qu’elle est essentiellement et directement causée par son activité professionnelle et qu’elle entraîne une incapacité permanente d’un taux au moins égal à 25 %. C’est la commission de réforme qui fixe ce taux sur proposition du médecin de l’agent et, s’il y a lieu, expertise médicale.

Démarches de l’agent

Identiques à celles pour un accident de service

Délais à respecter

  • Pour la transmission de l’arrêt de travail : identique à celui pour accident de service.
  • Pour la transmission du formulaire de déclaration : identique à celui pour accident de service.
  • Pour la transmission du formulaire de déclaration : 2 ans. Ce délai commence à courir, selon les cas soit à compter de la date de première constatation médicale de la maladie, soit à compter de la date du certificat médical établissant un lien entre une maladie déjà constatée et l’activité de l’agent. Si création de nouveaux tableaux ou modification : le délai de 2 ans commence à compter de la date de publication du décret y compris quand la pathologie a été médicalement constatée avant l’inscription aux tableaux.

Dérogations aux délais de déclaration : identiques à celles pour accident de service.

Actions de l’employeur en vue de l’octroi d’un CITIS (Congé pour invalidité temporaire imputable au service)

Rôle du supérieur hiérarchique : identique à celui pour accident de service.

Expertise médicale

  • En cas de maladie professionnelle inscrite aux tableaux du code de la sécurité sociale, l’administration peut solliciter une expertise médicale afin de se prononcer sur l’imputabilité au service si le médecin de prévention estime que la maladie ne satisfait (peut-être) pas à l’ensemble des critères des tableaux.
  • En cas de maladie professionnelle qui n’est pas inscrite aux tableaux, l’administration fait pratiquer une expertise médicale afin de déterminer :
  • Si la maladie est essentiellement et directement causée par l’exercice des fonctions ;
  • Et si elle est susceptible d’entraîner un taux minimum d’incapacité permanente, fixé à 25 %.

Saisine de la commission de réforme : seulement en cas de maladie professionnelle non inscrite aux tableaux du code de la sécurité sociale ou qui ne satisfait pas aux conditions de ces tableaux. Le délai imparti à l’administration pour rendre sa décision court à compter de la réception de la déclaration complète : 2 mois. Le délai supplémentaire n’excède jamais 3 mois. Le refus doit être motivé. Voies de recours : recours gracieux (recteur), hiérarchique (ministre) et contentieux (tribunal administratif).

Situation de l’agent en CITIS

Identique à celle de l’agent victime d’accident de service

Sortie du CITIS

La stabilisation de l’état de santé doit être portée à la connaissance de l’employeur qui clôture alors le dossier.

Guérison ou consolidation Dispositions identiques à celles pour accident de service.

Inaptitude définitive Dispositions identiques à celles pour accident de service.

Textes


Modalités de preuve

Les statuts de la fonction publique n’utilisent pas expressément la notion de « maladie professionnelle », ils renvoient à l’article L. 27 du Code des pensions civiles et militaires de retraite, lequel fait référence à la notion de maladies « contractées ou aggravées (…) en service ».

Une maladie contractée ou aggravée en service ou dans l’exercice des fonctions est celle qui est la conséquence directe de l’exposition à un risque physique, chimique, biologique ou résulte des conditions d’exercice de l’activité professionnelle.

La difficulté principale pour le fonctionnaire réside dans l’établissement du lien de causalité entre sa maladie et ses fonctions, la charge de cette preuve lui incombant. La seule preuve que la maladie est intervenue lors des heures de travail et sur le lieu de travail est insuffisante.

Le caractère professionnel de la maladie peut parfois être reconnu par référence aux tableaux des maladies professionnelles du Code de la sécurité sociale (article L. 461-2). Les listes de ces tableaux ne sont toutefois pas exhaustives et une maladie qui n’y apparait pas peut tout de même être reconnue comme imputable au service.

Ainsi, un état dépressif « qui a motivé la mise en congé de longue durée (…) est en relation directe tant avec l’incident qui l’a opposé en cours de service à l’un de ses collègues qu’avec les suites administratives qui ont été données à cet incident ; qu’il est constant qu’aucune prédisposition ni aucune manifestation pathologique de cette nature n’avait été décelée antérieurement chez le fonctionnaire ; l’affectation en cause devait être regardée comme « contractée dans l’exercice des fonctions » (CE, 11 février 1981, n° 19614).

Le Conseil d’Etat a estimé que la présomption d’origine professionnelle de l’article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale n’est pas applicable aux fonctionnaires de l’Etat (CE, 23 juillet 2012, n° 349726). Ceux-ci doivent donc établir l’existence du lien de causalité entre l’affection et le service, que la maladie en question relève ou non des tableaux de la sécurité sociale.

Démarches

L’agent doit avant tout obtenir un certificat médical d’un médecin, agréé ou non. Il doit ensuite souscrire une déclaration auprès son administration, et apporter tous les éléments susceptibles de prouver la matérialité des faits. Le juge administratif a récemment estimé que la demande tendant à ce que la maladie d’un fonctionnaire soit reconnue comme ayant été contractée dans l’exercice des fonctions doit être présentée dans les quatre ans qui suivent la date de la première constatation médicale de la maladie (CAA Versailles, 5 juillet 2012, n° 11VE01424).

L’employeur doit établir un rapport hiérarchique contenant des informations relatives à l’agent et à sa maladie, lequel sera transmis à la Commission de réforme dans l’éventualité de sa saisine.

La saisine pour avis de la Commission de réforme est obligatoire sauf lorsque l’imputabilité au service de la maladie est reconnue par l’administration.

Pour aider l’employeur à prendre sa décision, celui-ci peut consulter un médecin expert agréé. Ce médecin, en raison du secret médical, ne peut communiquer à l’administration que ses conclusions relatives à la relation de cause à effet entre la maladie et le service.

Si l’administration ne parvient pas à se prononcer sur l’imputabilité au service de la maladie, elle doit obligatoirement saisir la Commission de réforme et transmettre à son secrétariat l’ensemble du dossier.

L’avis de cette Commission, consultatif, ne lie pas l’administration : c’est un acte préparatoire à la décision finale de l’administration, seule susceptible d’être attaquée devant une juridiction. Les vices de cet acte préparatoire pourront être invoqués pour obtenir l’annulation de la décision finale.

La décision finale de l’administration relative à l’imputabilité doit être motivée en application de l’article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979. Elle peut néanmoins se borner à se conformer de façon expresse à l’avis de la Commission de réforme, à condition que cet avis soit joint à la décision et qu’il soit notifié à l’agent en même temps que la décision.

L’agent peut enfin exercer différents types de recours contre la décision de refus d’imputabilité prise par l’administration :

  • Un recours gracieux, lequel entrainera le réexamen du dossier par la Commission de réforme qui devra rendre un nouvel avis et donnera lieu à une nouvelle décision de l’administration.
  • Un recours contentieux contre toute décision de refus d’imputabilité, le recours gracieux n’étant pas obligatoire. Ce type de recours devra s’exercer devant le juge administratif dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision au fonctionnaire.

Régime de réparation

Le droit à traitement lors des congés

L’imputabilité de la maladie peut être reconnue indifféremment dans le cadre d’un congé maladie « ordinaire », d’un CLM ou d’un CLD (CE, 29 septembre 2010, n° 329073). Il s’agit alors d’un congé “spécial” de maladie (ordinaire, de longue maladie ou de longue durée) dans lequel l’agent est placé rétroactivement, dès que la maladie est déclarée imputable au service (la formule n’est pas dans les textes, mais utilisée par le Conseil d’Etat (CE 29 octobre 2012, n° 332387).

Le fonctionnaire conserve l’intégralité de son traitement jusqu’à la reprise du service ou la mise à la retraite (CE, 3 mai 2006, n° 267765).

Le décret n° 2010-997 du 26 août 2010 sur le maintien des primes et indemnités en cas de congé s’applique en cas de congé pour maladie professionnelle.

Le remboursement des frais :

Le fonctionnaire atteint d’une maladie professionnelle a droit au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie. (CE, 3 mai 2006, précité).

Ce principe bénéficie également à l’agent radié des cadres à la suite de la contraction de la maladie ou de l’accident.

L’agent est également protégé en cas de rechute. L’employeur au service duquel se trouvait l’agent au moment de l’apparition de la maladie, doit supporter les charges financières résultant de cette rechute, même si l’agent a changé d’employeur.

Le régime des pensions

Le fonctionnaire atteint d’une maladie imputable a droit à la réparation forfaitaire des dommages corporels, à laquelle s’ajoutent d’une part, la réparation des préjudices esthétiques, moraux, d’agrément et résultant des souffrances subies, et des indemnités complémentaires d’autre part, si la maladie imputable au service résulte d’une faute de l’administration (CE, 4 juillet 2003, Moya Caville, n° 211106).