Discrétion professionnelle
Il faut distinguer obligation de réserve, secret professionnel, obligation de discrétion professionnelle.
- L’obligation de réserve concerne l’expression par l’agent public de ses opinions personnelles.
- Le secret professionnel s’applique essentiellement aux professions réglementées (de santé ou sociales), et à certaines fonctions ou missions (protection de l’enfance, instruction de dossiers d’aide sociale, par exemple). Son non respect -par un fonctionnaire ou un non fonctionnaire- expose à des sanctions pénales.
- Le devoir de discrétion professionnelle concerne tous les fonctionnaires et vise les « faits, informations ou documents dont ils ont eu connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leur fonction ». Selon l’article 26 du Titre I du statut (loi 83-634 du 13 juillet 1983), ils risquent une sanction disciplinaire s’ils ne le respectent pas, voire des poursuites devant une juridiction civile pour atteinte à la vie privée.
Un agent public ne doit pas divulguer les informations relatives au fonctionnement de son administration. L’obligation de discrétion concerne tous les documents non communicables aux usagers. Elle protège tant l’administration contre la divulgation d’informations relatives au service qui pourrait nuire à l’accomplissement des tâches ou à la réputation de l’administration, que les administrés.
Cette obligation s’applique à l’égard des administrés mais aussi entre agents publics, à l’égard de collègues qui n’ont pas, du fait de leurs fonctions, à connaître les informations en cause.
L’obligation est particulièrement forte pour certains agents (magistrats tenus au secret de l’instruction, agents chargés du courrier tenus au secret des correspondances, agents des services du personnel pour les dossiers individuels). Les membres des Commissions administratives paritaires sont également liés à cette obligation dans la mesure où ils ont connaissance des situations personnelles. Les membres non médecins de la commission de réforme peuvent prendre connaissance de la partie médicale des dossiers soumis à leur avis. Dès lors, ils sont tenus à l’obligation de discrétion professionnelle (Question Ecrite du 18 juillet 2013 – N° 06187).
Loi n° 83.634 du 13 juillet 1983, article 26 : « Les fonctionnaires doivent faire preuve de discrétion professionnelle pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions. En dehors des cas expressément prévus par la réglementation en vigueur, notamment en matière de liberté d’accès aux documents administratifs, les fonctionnaires ne peuvent être déliés de cette obligation de discrétion professionnelle que par décision expresse de l’autorité dont ils dépendent.«
Sanctions disciplinaires
Comme l’obligation de secret professionnel, le manquement à cette obligation qui constitue essentiellement en la divulgation non autorisée d’informations est sanctionné sur le plan disciplinaire.
- Un agent qui diffuse sur Internet des éléments détaillés et précis sur l’organisation de son service méconnaît son obligation de discrétion profes-sionnelle (CE, 20 mars 2017, n° 393320).
- Dévoiler la teneur d’une réunion entre le directeur général des services et la directrice des ressources humaines concernant le reclassement professionnel d’un agent constitue un manquement à l’obligation de discrétion professionnelle “Considérant que M. X a adressé, de sa propre initiative, un compte-rendu de l’entretien (…) qu’il a eu avec le directeur général des services et la directrice des ressources humaines concernant le reclassement professionnel d’un agent, au supérieur hiérarchique de cet agent en méconnaissance du devoir de discrétion professionnelle qui s’impose à tout fonctionnaire ; que ce comportement revêt un caractère fautif.” (CAA de Versailles du 24 septembre 2009 – N° 08VE01456).
- Communication de copies de correspondances : « Il ressort (…) qu’en donnant copie de ces correspondances à son client, le requérant a exposé à l’extérieur du service des tensions au sein de ce dernier, commettant ainsi un manquement à son obligation de discrétion professionnelle » (CAA Nancy 4 août 2011, n° 10NC01518).
Divulgation d’informations nominatives confidentielles : « Considérant que la sanction disciplinaire attaquée a été prise à raison de deux manquements successifs à l’obligation de secret et de discrétion professionnels commis par M. A auquel il est reproché, en premier lieu, d’avoir remis (…) une fiche extraite du système de traitement des infractions constatées (STIC) contenant des informations nominatives confidentielles (…), en second lieu, d’avoir répondu favorablement à la demande d’un ancien fonctionnaire de police qui l’avait sollicité pour obtenir des informations (…) au risque de troubler les investigations policières et judiciaires en cours (…) » (CE 30 novembre 2007 M. Eric A. req. n° 298814).
Divulgation d’informations relatives à un examen : « bien que la requérante (…) [n’ait] pas diffusé ces informations aux élèves de son lycée et [n’était] pas à l’origine de la médiatisation de l’affaire, le fait d’avoir divulgué des informations confidentielles relatives à des sujets d’examen, alors qu’elle avait, de surcroît, souscrit un engagement exprès de confidentialité, constitue (…) une faute professionnelle de nature à justifier le prononcé d’une sanction disciplinaire ; que ce comportement a eu pour conséquence de nuire à la bonne préparation des épreuves (…) ; que, compte tenu de la gravité des manquements à ses obligations de discrétion professionnelle et d’obéissance hiérarchique que ce comportement traduit (…), ainsi que de la méconnaissance des obligations strictes de confidentialité qui lui incombaient, en l’espèce, l’autorité disciplinaire n’a pas pris une sanction disproportionnée en prononçant à son encontre la mesure d’exclusion temporaire pour une durée de trois mois ». (T.A. Pau, 30 décembre 2014, n° 1301438).
Sanctions pénales
Bien que le manquement au devoir de discrétion professionnelle ne constitue pas directement une infraction pénale comme le manquement au secret professionnel, certains faits constitutifs de sa violation peuvent néanmoins être sanctionnés pénalement (par exemple la violation du secret des correspondances).