Les missions des CROUS (gestion des Bourses, de l’hébergement et de la restauration des étudiants selon des critères sociaux définis par la loi) sont depuis un an l’objet d’une attention toute particulière du Gouvernement.

Dans les trente dernières années, l’Etat n’a pas donné aux
CROUS les moyens de construire un parc de logement social
étudiant à la hauteur des besoins, encore moins de le rénover.

Le programme Anciaux de construction (5000 logements par
an) et réhabilitation (7000 logements par an) n’a pas comblé
le retard. Le Gouvernement a donc annoncé le 5 septembre
un projet de reconversion de bâtiments militaires en
logements étudiants (6000 d’ici à 2012) mais selon des
modalités inquiétantes (utilisation des crédits Anciaux,
possibilité de la propriété foncière offerte aux collectivités
locales, recours au Partenariat Public Privé, les CROUS
apporteront « leur expertise » aux projets mais « pourront
aussi être sollicités pour assurer la gestion et l’attribution des
chambres » – une possibilité donc mais plus un droit !
Avec ce projet, c’est l’expérimentation d’une idée chère à
Valérie Pécresse de rechercher le transfert du logement social
étudiant aux collectivités locales ou au privé.
Le plan « Campus », décidé en décembre en pleine crise
financière, va concentrer un effort financier supplémentaire
en matière d’investissement sur 11 villes dont les
établissements universitaires doivent atteindre une taille
européenne, « concurrence oblige ». Il ne modifiera pas
fondamentalement la donne en matière d’hébergement
étudiant et aggravera les disparités entre villes universitaires
selon qu’elles bénéficieront ou non de la « manne de l’Etat ».

Redéploiement des personnels

Le rapport Lambert rendu public le 8 septembre 2008
préconise pour sa part la transformation des CROUS en
« Agences pour la Vie Etudiante » qui bénéficieraient d’ « une
autonomie renforcée » et de « la maîtrise élargie du budget
global et de la masse salariale», d’un « élargissement des
compétences des directeurs d’agences dans le domaine de la
gestion des personnels de l’Etat et du recrutement de
personnels contractuels », une « présence renforcée des
Universités dans les conseils des AVE », le « maintien a
minima de la représentation étudiante ». Un audit est
demandé pour « redéployer les personnels administratifs ».
Ce rapport préconise aussi un renforcement des missions
historiques des CROUS : les AVE devraient gérer entièrement
les aides sociales aux étudiants, les aides au logement,
bénéficier d’une augmentation de la subvention de l’Etat pour
le financement de la restauration universitaire, recevoir la
gestion des maisons de santé et la responsabilité d’un service
social unique avec transfert des postes des assistants sociaux.
Ce rapport écarte donc la perspective d’un éclatement des
oeuvres universitaires mais au prix d’une transformation de la
structure qui serait contrainte de réduire ses dépenses de
personnels administratifs et qui pourrait faire la part belle, en
son propre sein, à ceux qui revendiquent la dévolution de
certaines missions des CROUS.

Rôle accru de la CPU…

Car depuis le vote de la LRU, la CPU revendique ouvertement
pour les Universités « une place prépondérante » en matière
de vie étudiante, de conditions d’accueil, de logement et de
restauration » (communiqué de presse du 18 septembre) et
estime qu’il est « primordial, dans une perspective de
compétition internationale accrue et de politique
d’attractivité des universités, de conserver une approche fine
de la politique de vie étudiante, site par site, distincte d’une
logique académique ». Et pour cela, réclame la présidence du
CA des AVE, la gestion des bourses de mobilité et au mérite.

…et désengagement de l’Etat

La Direction du CNOUS, dans ce moment crucial, s’est gardée
d’intervenir dans le débat public comme si le CNOUS
renonçait à être l’acteur essentiel d’un débat essentiel.
Depuis, la stagnation de la subvention d’Etat met le réseau
dans une situation de plus en plus difficile. Fin juillet 2009,
elle fait connaître son « projet 2010 – 2013 pour le réseau des
oeuvres universitaires ». Il n’est qu’une adaptation au
désengagement financier de l’Etat ; ce n’est donc pas
surprenant d’y trouver toute une série de propositions qui
visent tout à la fois à trouver des recettes nouvelles par la
diversification de l’offre, le renforcement des liens avec les
établissements d’enseignement supérieur ; à faire des
économies par les « mutualisations » et la « contractualisation »,
la maîtrise de la masse salariale par une gestion
prévisionnelle des emplois, la « profilage » de certains postes,
la « valorisation des responsabilités et compétences des
Personnels Administratifs »…

Le projet du CNOUS pour les trois prochaines années n’est
donc pas de nature à sortir le réseau de ses difficultés.
Le Gouvernement s’en satisfait et se donne le temps
d’étudier quelle forme de RGPP il va appliquer au réseau des
oeuvres universitaires.
Si devait prévaloir sa volonté d’éclatement et de transfert
des missions des CROUS jusqu’ici assumées par l’Etat à des
« partenaires » publics et / ou privés, c’en serait fini des
oeuvres sociales universitaires.
Avec les personnels des CROUS, les étudiants usagers, le
SNASUB ne laissera pas faire !

Jean-Claude Magrinelli