Ça y est, plus de la moitié des universités françaises (60%)
auront basculé dans l’autonomie en janvier 2010.
Il faut se rappeler que, dans le supérieur, l’AENES représentait
en 2007 18.398 collègues dont 2.529 A, 4.662 B, 11.207 C,
les Bibliothèques 4.368 collègues dont 1.323 A, 1.228 B, 1.817
C, les ITRF 33.492 dont 9.716 A, 7.779 B, 15.997 C.
60% de nos 56.258 collègues ne seront plus gérés et payés
par l’Etat.
Après les 18 premières en janvier 2009 ( Aix-Marseille 1,
Cergy-Pontoise, Clermont-Ferrand , Corte, Limoges,
Lyon 1, Marne-la-Vallée, Montpellier 1, Mulhouse, Nancy 1,
Paris 5, 6 et 7, La Rochelle, St Etienne, Strasbourg, Toulouse 1,
Troyes), en janvier 2010, 33 autres universités deviendront
autonomes (Aix-Marseille 1&3, Angers, Avignon, Besançon,
Bordeaux 1&2, Bretagne occidentale & sud, Clermont-Ferrand
2, Dijon, Grenoble 1, Lille 2, Littoral, Lyon 3, Metz, Montpellier
2, Nantes, Nice, Paris 2, 11, 12 et 13, Pau, Poitiers, Rennes
1&2, Toulouse 3, Tours, Valenciennes et Versailles) ; sans
compter les 3 instituts nationaux polytechniques (Grenoble,
Lorraine, Toulouse) et les 2 écoles nationales supérieures
(Paris et Lyon).

Quelle conséquence pour les collègues dont l’établissement
devient autonome?

Première conséquence : leurs postes ne sont plus fléchés
dans les budget de l’Etat. En effet, la loi LRU (liberté et
responsabilité des universités) prévoit le transfert du titre 2
(budget d’Etat) sur le titre 3 (budget d’établissement) de la
masse salariale des établissements passant aux RCE
(responsabilités et compétences élargies). Ainsi on donne une
somme d’argent pour les crédits de rémunération (435,9 M
pour les 18 universités autonomes de 2009 et 809,4 M pour
les 38 de 2010) mais pour toute université autonome, à part
la première année, il n’y aura plus aucune précision sur la
distinction entre personnels d’encadrement, IATOS et
personnels bibliothèque ; pour la simple raison qu’une
université autonome ne sera plus liée par une politique
nationale. Elle fera ce qu’elle voudra de ses emplois et de ses
personnels.

Il faudra doubler de vigilance car il y aura autant de gestion
de ressources humaines différentes qu’il y aura
d’établissement autonome. Chaque université fera ce qu’elle
veut et si une d’elle décide de remplacer tous les départs (à la
retraite ou en mutation) des BIATOS par du personnel
enseignant, rien ne l’en empêchera.
Et si elle veut remplacer des personnels de bibliothèque par
du personnel ITRF en BAP F (Diffusion Edition
Communication) ou des personnels de l’AENES par du
personnel ITRF en BAP J (Gestion scientifique et technique),
elle le pourra sans problème, au détriment des collègues de
l’AENES et des Bibliothèques ; puisque tout poste transformé
est un poste en moins pour la mutation ou la promotion.

Par exemple, en 2009, les personnels de bibliothèque ont pu
se mobiliser quand, dans le plan de loi de finance 2009, la
ligne budgétaire des personnels bibliothèques a été fusionnée
avec celle des personnels ITRF. Demain, ils ne le pourront plus
dans les établissements autonomes puisqu’il n’y aura plus
d’affichage. On ne parlera plus que de masse salariale.

Il faut se rappeler que le rapport Schwartz, donnant des
indications à suivre dans le supérieur, a fortement
conseillé (recommandations 41 à 47) de n’avoir plus que des
ITRF dans les universités et ce parce que « La gestion des ITRF
a toujours été plus souple que dans les autres filières (p.93) ».

Deuxième conséquence : c’est le perte du droit à la mutation
pour les administratifs et bibliothèques. En effet, les
universités autonomes ont reçu un droit de veto qui leur
permet de refuser des collègues demandant leur mutation
dans le supérieur. Tous les postes AENES et Bibliothèque du
supérieur ont été mis en PRP (Poste à Responsabilité
Particulière), même pour les C. Il faut alors avoir un entretien
et un accord de gré à gré (donc se vendre comme dans le
privé) pour pouvoir intégrer une université. Les CAP n’ont plus
leur mot à dire et les mutations sur barèmes ne sont plus
valables. Le bilan est catastrophique. Les universités ont
refusé 10% des concours IRA et sur Paris, par exemple, les
universités ont refusé entre la moitié et les 3/4 des candidats
à la mutation. Le ministère a même du intervenir pour «
imposer » à une université deux magasiniers qui avaient
pourtant obtenu leur mutation en CAPN.
Autant dire que notre demande de créer un droit à mutation
pour les collègues ITRF s’éloigne toujours plus alors qu’est
remis en cause ce droit à la mobilité pour ceux qui y en
bénéficiaient.

A priori, les universités n’ont retenu de loi LRU (liberté et
responsabilité des universités) que le mot liberté. il faudra
qu’on se mobilise pour leur rappeler celui de responsabilité,
surtout au moment où nous sommes en pleine affaire de
l’université de Toulon.
Valérie Pécresse a suspendu le président de l’université de
Toulon et ses deux vice-présidents, soupçonnés d’avoir
entravé l’enquête administrative sur les procédures
d’admission des étudiants étrangers dans le cadre de l’affaire
d’un présumé trafic de diplômes au profit d’étudiants chinois.
D’après le ministère, un rapport « fait apparaître que le
Président et son équipe de direction ont entravé l’enquête
administrative, avec des mises à l’écart, pressions,
intimidations et menaces de représaillesà l’encontre
d’enseignants-chercheurs et de personnels de l’université et
une saisine de documents qui peut laisser supposer une
tentative de destruction de preuves ».
Sans préjuger de l’affaire et dénoncer des coupables, ce genre
de situation ne pourra qu’arriver.

Il faut dire que cette loi LRU qui devait dynamiser le supérieur
n’a eu pour le moment que la conséquence que nous avons
toujours dénoncée : une concurrence acharnée entre
établissements, poussant, pour être plus « compétitif » à des
regroupements et fusions, à travers les PRES par exemple,
pour écraser la concurrence. Et il y aura forcément des
universités qui resteront sur le carreau, les mettant dans la
situation de faire tout ce qu’ils peuvent pour survivre, même
en pressurant les collègues ou en « vendant » des diplômes…

Pascal Tournois