Transformation de CDD en CDI : la réalité des fonctions l’emporte sur les appellations des contrats
Après un contrat de trois ans en qualité de technicien, un agent a vu son contrat résilié et remplacé par un CDD de trois ans pour exercer les mêmes fonctions, mais en tant qu’ingénieur, ce qui correspondait à son niveau de diplôme.
Trois ans après le renouvellement, ce contrat a été résilié. L’agent conteste cette décision, estimant qu’il aurait dû bénéficier d’un CDI, en additionnant ses services de technicien et ceux d’ingénieur. La cour administrative d’appel rejette sa demande, en considérant que ses premières fonctions étaient d’un niveau hiérarchique différent, mais en cassation, le Conseil d’État estime que seule compte la réalité des fonctions exercées, « en dépit des indications figurant sur les contrats ».
L’article 6 bis de la loi 84-16 du 11 janvier 1984 indique notamment que lorsqu’un agent atteint l’ancienneté de six ans « avant l’échéance de son contrat en cours, celui-ci est réputé être conclu à durée indéterminée ».
Le Conseil d ‘Etat précise la motivation de son arrêt : « Lorsque les contrats successifs de l’agent mentionnent, s’agissant de l’emploi qu’il occupe, des appellations et références catégorielles différentes, il peut néanmoins bénéficier d’un contrat à durée indéterminée s’il est établi qu’il a en réalité exercé, en dépit des indications figurant sur les contrats, des fonctions identiques pendant la durée de services requise » (CE, 28 juin 2019, n° 421458).
Les conditions du non renouvellement
Un agent communal recruté par CDD et renouvelé deux fois, est finalement avisé du non renouvellement.
Il demande à son employeur de requalifier son contrat en CDI, ce qui est refusé. Il saisit le tribunal administratif, puis la CAA, qui confirme le jugement de première instance, mais précise les critères permettant d’apprécier le caractère abusif ou non des renouvellements successifs. Un agent public en CDD ne bénéficie pas d’un droit au renouvellement de son contrat et l’administration peut décider de ne pas le renouveler pour un motif tiré de l’intérêt du service. Dans le cadre d’un recours contentieux, l’administration doit prouver qu’elle a agi dans l’intérêt du service, alors que le requérant prétend le contraire. Ici, l’intérêt du service est établi, selon la cour, au regard du fait que le fonctionnaire finalement recruté sur le poste détenait un niveau de qualification supérieur à celui du requérant. (CAA de Nancy, 5 mars 2019, n° 17NC00932).
Le Conseil d’Etat juge que la méconnaissance du délai d’information de l’agent sur l’intention de l’administration de renouveler ou non le contrat est susceptible d’engager la responsabilité de cette dernière mais n’entraîne pas l’illégalité de la décision de non renouvellement du contrat (CE 23 décembre 2011, n° 335477, Danthony).
Abus de CDD, mais pas de CDI
Une employée municipale, recrutée de façon quasi permanente par une soixantaine de contrats successifs sur les mêmes fonctions, demande sa CDIsation. Cependant, certains contrats concernaient des remplacements ou des tâches saisonnières et établis « sur le fondement des articles 3-1et 3-2 de la loi (…) aucune disposition ne permet la transformation en CDI d’un CDD conclu sur le fondement de ces articles ».
Depuis, la requérante a d’ailleurs été titularisée. Elle n’a pas introduit de requête indemnitaire et n’établit aucun préjudice moral ni aucun préjudice financier ou de carrière, et ne pouvait donc obtenir la condamnation de l‘employeur public à une somme l’indemnisant de l’abus qui avait été commis. (CAA de Nantes, 24 juin 2019, n° 17NT03638).
Un seul jour ne suffit pas pour préparer sa défense
Un agent communal contractuel est licencié au motif de la suppression de son emploi. Le tribunal administratif annule le licenciement pour vice de procédure et accorde à l’agent une indemnité pour le préjudice subi. L’agent estime cette réparation insuffisante et se pourvoit devant la Cour administrative d’appel, qui confirme le caractère illégal du licenciement, pour vice de procédure.
Le requérant n’a reçu la convocation que la veille de l’entretien préalable. Il n’a pas pu, de ce fait,
consulter son dossier et n’a pas été informé de la possibilité d’être assisté d’un conseil ou d’un représentant du personnel. « Il doit être regardé comme ayant été privé d’une garantie, notamment celle de pouvoir présenter utilement ses observations, quand bien même le motif du licenciement évoqué dans la convocation , à savoir la suppression de son emploi pour raisons budgétaires, présenterait un caractère objectif ».
La cour refuse toutefois l’indemnisation : «« Les préjudices que l’appelant soutient avoir subis du fait de l’illégalité de son licenciement ne peuvent être regardés comme la conséquence du vice dont cette décision était entachée » (CAA de Douai, 6 mai 2019, n° 17DA01422).